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Note d'intention
"Mur d'Hadrien"

Des murs se construisent, d’autres tombent en ruine, autant constructions défensives que symboles de pouvoir, moyens de discrimination pour mieux faire cohésion, ces frontières humaines qui de tout temps ont été érigées questionnent notre rapport identitaire et notre besoin d’adosser nos valeurs éphémères à la pérenne rugosité des pierres assemblées.
 

Le mur d’Hadrien fait partie de ceux-ci, construit au début du IIème siècle à la frontière de la province romaine de Britannia, puis tombé peu à peu en désuétude, il devait assurer, sous risque de dilution, une limite à un empire pour qu’une nation prenne forme.
Son histoire nous rappelle que même de pierre une frontière est friable, que l’humanité s’est réalisée par la mobilité et l’échange et que rien n’est étanche à la force du désir.

Je me propose de réaliser un reportage photographique de cette construction, des lieux qui l’environnent et des traces qu’elle a laissé dans le paysage. J’envisage également de la suivre là où elle a disparu, là où elle a été dispersée en élément de construction, en voies pavées et en parement d’habitation.

Le paysage est le lieu où l’artiste côtoie le discours scientifique, le lieu où le regard croise l’analyse. La géographie, cette « science du paysage » et d’autant plus disponible à une exploitation artistique que la frontière entre examen scientifique et perception esthétique y reste floue.

La photographie est un médium qui se prête parfaitement à ce jeu, à ce coulissement entre réel et imaginaire, son histoire est faite de cette dualité et les discours sans fin sur sa nature ne sont que le reflet de la multiplicité de ses possibles interfaces.

Je profite de cet entre deux pour questionner notre rapport intime au paysage, ce basculement qui nous fait passer d’une topologie à la constitution d’une forme d’identité, d’une limite physique ou virtuelle, cartographiée et normalisée, à des valeurs et des habitus.

Je m’intéresse à ces lieux où le paysage fait l’homme qui façonne le paysage, coévolution dans laquelle l’homme n’est que le produit d’un environnement qu’il a lui-même produit. 

Pour ce faire je procède à un relevé systématique, à un « arpentage photographique ».
Si ce protocole relève du style documentaire dans ce qu’il a de plus rigide, le résultat et souvent chargé des émotions esthétiques vécues lors de la prise de vue, manière de signifier par là une impossible prise de distance.

Protocole d’intervention

 

Contexte:

Construit à partir de 122 après J.-C., le mur d’Hadrien marquait la limite septentrionale de la province romaine de Britannia, qui couvrait l’Angleterre, le pays de Galles et le sud de l’Ecosse. Avec ses 5m de haut et ses 3m de large, il s’étirait sur environ 120 km, du fleuve Tyne à l’est jusqu’au Solway Firth à l’ouest.

Prouesse architecturale dans des terres sauvages où les constructions en pierres étaient rares, il a certainement été vécu par les habitants comme l’irruption d’un autre monde et en cela remplissait totalement son objectif psychologique, qui était d’affirmer, l’emprise romaine sur ces terres aux confins éloignés de l’empire.

Laissé à l’abandon, pillé par les villageois il reste malgré tout de nombreux vestiges de cet ouvrage, soit en tant que reste du mur d’origine soit comme éléments dispersés, intégrés dans d’autres constructions


Objet du projet photographique:

Le projet photographique revêtira la forme d’un relevé systématique, il permettra d’identifier ce qui subsiste de cet ouvrage, d’en répertorier les éléments disséminés et à en suivre les traces là où il a disparu. Il sera donné à voir sur la totalité de son parcours, visible ou invisible, ses restes dispersés seront exhumés.

Au-delà de l’aspect inventaire, propre au style documentaire, une part importante du projet consistera à convertir cette matière « objective » en expérience artistique, en façonnant des images qui rendent compte du passage qui s’est opéré entre une construction à usage fonctionnel et l’objet d’une expérience esthétique.


Méthodologie

Avant :

  • Recherches documentaires : Identification des vestiges, des éléments disséminés et des cheminements disparus.

  • Recherche et prises de contact avec les interlocuteurs potentiels (historiens, géographes, associations locales, musées...)

  • Organisation et planification logistique

Pendant :

  • Relevé photographique sur le parcours du mur

  • Prises de vue des éléments dispersés

  • Prises de vue de l’ancien tracé disparu

Après :

  • Traitements de la totalité des prises de vue

  • Géolocalisation des images

  • Constitution d’une base de données documentaires

  • Sélection et édition en vue d'une restitution

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